Qui pisse au vent se rince les dents
17 avril 2012 Je me lève péniblement le matin, j'ai accumulé un peu de fatigue.
Je profite de ma rencontre avec la cycliste française la veille pour échanger une partie de mes Forint hongrois et de mes Dinars serbes. Je la sens un peu méfiante et soupçonne un poil d'avarisme (mes restes doivent environ 20 €, à plus ou moins u1 € près). Je lui donne également une carte routière de Serbie qui ne me sera dorénavant d'aucun usage.
Après le petit déjeuner, au moment de rendre la clef de la chambre, le tenancier de l'hôtel vient me demander 1 € pour… le café servi avec le petit déjeuner (qui se résume à une omelette un peu légère, du pain … et il a fallu que je demande la confiture sinon j'aurai rien eu). J'ai un peu l'impression de me faire pigeonner.
Enfin bref, je sors de la ville et … y'a du vent! Et il fait froid.
Le vent est tellement fort que je fais 30 km en environ trois heures ! Je ne serai jamais à Bratislava ce soir à ce rythme ! En outre, je ne trouve pas la piste cyclable. Je décide donc de suivre la route départementale (qui est plus courte d'environ 35 km puisqu'elle mène directement à Bratislava sans longer le Danube).
Je m'arrête à Veľký Meder pour déjeuner. Repas du midi dans un restaurant où je prends la formule du jour (à 5 € s'il vous plaît !). Là m'est servie une soupe aux choux ainsi qu'un truc à base de pain, de sauce un peu épicée et de porc. Autant vous dire que ça cale bien.
Pendant le repas, le temps se couvre. Je me dis que finalement, je ferai mieux de prendre le train.
Je cherche la gare. Personne ne sait où elle est… bref, je me paume dans le bled (et je rentre par erreur dans une école!).
En tâtonnant dans la ville, je trouve la gare routière. Derrière se cache le « quartier gypsi » (qui correspond à un pâté de maison). J'aperçois quelques lignes électriques derrière. La gare de chemin de fer est là !
Un homme en gilet orange me montre les horaires de trains. J'en ai pour une heure d'attente. Il me dit que je peux aller dans le café à côté pour attendre. Je suis son conseil. En rentrant dans le café, c'est comment dire… un peu la rencontre du troisième type. Cinq grandes tables. Un homme sur ma droite joue à une machine à jeux. La table du fond est vide. Un énooorme bonhomme avec trois verres devant lui est au milieu. Sur ma droite les tables sont vides. La serveuse me demande ce que je veux, je prends un café et, Andreï, l'homme du milieu, m'invite à le rejoindre à sa table. J'acquiesce et m'installe en face de lui.
J'ai aucune idée de ce qu'il boit, mais compte tenu des quantités, ça doit être assez fort. Deux verres couleur jaunes/orange ainsi qu'un verre marron foncé sont alignés devant lui. Il m'explique qu'il est déjà allé en France deux fois, il y'a longtemps. Pour le reste de la discussion, c'est un peu compliqué à expliquer. L'homme, au demeurant fort sympathique, ne devait pas être à sa première tournée.
Et tout cela, c'est sans compter sur ses camarades : les Veľký'z Boy's n'étaient pas encore au complet !!
Un nouveau laron entre dans la place. C'est un homme bossu. Il porte un gilet jaune et tiens du bois dans ses mains pour le poêle situé au milieu de la pièce. Il ressemble un peu à Gaston dans le sktech des inconnus « les sous-sous dans la popoche » (un peu plus blanc et quelques dents en moins).
En tous cas il ne perds pas le nord puisqu'il s'assoit, prends une bière ainsi qu'un petit verre à côté (il doit probablement s'agir d'une vodka puisqu'il boira le breuvage un peu plus tard cul sec).
Ensuite arrive encore une autre personne qui s'assoit à la gauche de la salle (devant moi). L'équipe ne serait pas au complet sans le dernier personnage de la bande qui lance en espaçant chaque syllabe un « jó napot kívánok barátok » (« bonjour les amis! »). C'est à ce moment là que je comprends qu'ils parlent tous hongrois depuis le début.
Quoi qu'il en soit, les deux derniers protagonistes arrivés n'ont rien à dire. Ils jouent « à la maison ». La serveuse leur apporte directement et sans broncher une pinte de bière accompagnée d'un verre de vodka.
Vous me direz que vu les tarifs pratiqués pourquoi se priver ? (la pinte doit même pas franchir 1 €, idem pour la vodka),
Peu après mon camarade de table se décide à partir, il me serre la pogne de façon assez virile, me souhaite bon voyage, etc.
L'homme au gilet jaune, confortablement installé au fond de la salle, lâche un rot, puis s'endort paisiblement.
Tous ces événements m'ont donné un peu faim. Je me décide à prendre des petits gâteaux (là encore, les tarifs défient toute concurrence !) avant de partir puisque mon train est annoncé dans quelques minutes. Au moment de payer, je comprends que le café m'a été offert par mon copain de table, ce que je trouve vraiment sympa :)
Pendant ce temps, le gus du fond qui joue à la machine à jeux n'a pas bougé depuis le début : il est littéralement skotché à sa machine. La serveuse change tout de même son cendrier… pour jeter les cendres dans le poêle à bois !
Ensuite je prends le train. C'est assez rare mais le personnel de bord ne m'ennuie pas avec la présence du vélo et il n'est pas nécessaire de faire une réservation.
J'arrive à Bratislava. J'ai beaucoup de mal à trouver un hostel (j'avais une liste), les rues sont super mal indiquées … Après plus d'une heure à tourner en rond, je commence sérieusement à perdre patience… J'ose pas demander ma route de peur d'envoyer bouler la personne qui serait susceptible de m'aider. Après avoir recopié le plan derrière une pancarte publicitaire, je me rends compte que je vais dans le mauvaise sens… je retourne à la pancarte, je recopie mieux … c'est bon… je me reperds et …. je vais dans la bonne rue… et … rien. RAAAAHAHAHHAHAHAH !!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Respiration, expiration. Je pense au cours de gestion du stress à l'école des avocats …. On se calme …
Je retourne sur mes pas sur la rue principal. Il y a un panneau qui indique un hostel. Ça y est, j'ai trouvé !!!!!!!! Enfin !!!!! L'entrée était juste de l'autre côté de la rue …
L'hostel est énorme (c'est un bâtiment entier sur quatre étages). C'est une vraie usine. C'est pas très humain, ni idéal pour rencontrer du monde. Mais j'ai besoin de m'isoler et de me reposer un peu, ce qui n'est pas plus mal.
Je partage ma chambre d'une dizaine de lits avec une russe d'une quarantaine d'année très sympa mais qui a l'air sérieusement allumée (et, à mon avis, notoirement alcoolique). Elle m'explique notamment qu'elle ne comprends pas qu'on ne puisse pas marcher le long des autoroutes comme en Russie. Ouais, c'est vrai, les autoroutes en Europe c'est vraiment n'importe quoi ! Camarades piétons, ré-approprions-nous les autoroutes ! :) Sinon elle aime le Portugal, l'Espagne et la France (et … Paris !!!). Et le vin et la bière.
En tous cas, il est 23 h et tout est fermé dans Brastislava, à l'exception d'une discothèque au bout de la rue située sous un centre commerciale dont on entend les boum-boum (ça doit être sympa pour les proches voisins). Mais ça ne permet pas d'occulter le principal : j'ai faim.
Je profite de ma visite nocturne rapide de la ville pour prendre un sandwich dans un boui-boui resté ouvert. Je me décide à rentrer à l'hostel puis j'entends au loin des françaises se plaindre que « tout est fermé, non mais c'est quoi cette ville pourrie ». Ça me fait rigoler. Je rentre me piauter.